Arrivé d’Irak il y a 10 ans, Andrew Al Yacoub pratique le chant, notamment sacré, et se passionne pour la musique des pays africains. Diversité, laïcité et tolérance sont pour lui des valeurs fondamentales. Portrait.
« J’adore le coquelicot. C’est une fleur qui pousse dans des endroits improbables, dans les pires conditions. Vous saviez que son nom venait de cocorico, parce que la forme et la couleur du pétale rappelle la crête du coq ? D’ailleurs, cocorico se dit différemment dans les autres langues ».
Ce premier échange est à l’image du jeune homme. Andrew Al Yacoub est un poète, un amoureux des mots et des langues. Il en parle cinq : le français, l’anglais, l’araméen, l’arabe et l’espagnol. Cela fait 10 ans qu’il a quitté son Irak natal. Et ce n’est pas tant à cause de la guerre, tient-il à préciser. « C’est plutôt parque nous faisons partie de la minorité chrétienne. Et sans être persécutés, on subissait discriminations, pressions… »
Son premier amour : le chant
A son arrivée en France, c’est par l’Institut Telemaque qu’il va apprendre la langue et s’ouvrir à la culture. « Grâce à eux, j’ai eu un référent scolaire jusqu’à la terminale. J’ai eu une bourse et j’ai pu faire des voyages, apprendre à nager. Ils m’ont aussi donné certains codes de vie en société et redonné confiance en moi ».
Il découvre ainsi le théâtre grâce à la troupe du Théâtre du désordre de l’esprit, avec qui il part en tournée au Nicaragua. Mais son grand amour, c’est la musique. Et particulièrement le chant, qu’il pratique tout le temps, partout. « Les gens me prennent pour un fou. Mais je m’en fiche». Andrew chante à la chorale de son église et fait partie d’un groupe, Al Quithara, qui a donné son premier concert dans un bar de la Guillotière il y a quelques semaines. Andrew accompagnait un oudhiste, un violoniste, un bouzoukiste, un saxophoniste et un percussionniste. Leur répertoire puise dans la musique arabe essentiellement, sans s’interdire quelques incursions dans d’autres univers.
Ouvert à tout, Andrew s’intéresse ainsi aux musiques de tous les pays africains. « Mon objectif serait de réaliser une vidéo pour chaque pays où je présente plusieurs artistes. »
Une passion pour l’écriture
Andrew s’est également mis à l’écriture, au sein de l’atelier Dans tous les sens à Vaulx-en-Velin. « J’écris des chansons, des nouvelles, des poèmes et j’ai également un projet de roman. Et j’essaye de mettre en musique des psaumes ». Il aimerait également tenir un atelier de musique arabe, y compris sacrée.
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Andrew écrit des chansons, des nouvelles, des poèmes. / F. H |
Car sa foi est son moteur. « J’essaye d’aider et comprendre mon prochain, et de rendre grâce à Dieu dans tout ce qui m’arrive. » La tolérance et la laïcité sont pour lui des valeurs cardinales, qui le poussent à aller vers les autres en les acceptant dans toutes leurs différences. Avec son compte Instagram, il essaye de distiller de messages positifs et d’encouragement, sur l’importance d’être soi-même et s’accepter.
A 21 ans, en 2e année de psychologie, Andrew dit avoir enfin trouvé sa voie après un passage en lettres modernes et en sciences de l’éducation. « La psychologie m’ouvrira plus de voie. Cela me permet de mieux saisir ce que les gens souhaitent, mieux lire l’ambiance d’une salle pendant un concert. J’ai plus de recul aussi ». Si son rêve serait de vivre de la musique, il souhaite décrocher son diplôme et pourquoi pas concilier les deux.