Un projet d’habitat partagé et éco-agricole redonne vie à la Ferme du Suchel

5 amis trentenaires se sont associés pour racheter et remettre en état une ancienne ferme du Beaujolais. Leur projet d’habitat partagé prévoit un volet agricole, en permaculture. Les premiers emménagements devraient intervenir cet été

Bien avant la pandémie et la rhétorique du monde d’avant/monde d’après, des citoyens réfléchissaient à un autre mode de vie possible, basé sur le collectif et le partage. C’est ainsi que 5 amis trentenaires ont décidé de sauter le pas en 2012 et construit leur projet d’habitat partagé, dans une logique éco-responsable. « Pour nous, un autre modèle de société était possible. On n’en pouvait plus de travailler et consommer toujours plus. Nous voulions concilier bien-être personnel, sobriété, respect de notre environnement, partage et coopération », explique Alexandre, l’un des initiateurs du projet. Ils établissent alors un cahier des charges pour une micro-société d’une vingtaine de personnes : un lieu à rénover, avec de l’espace autour et pas trop loin de Lyon.

Le groupe découvre la Ferme du Suchel, en vente pour un projet agricole. Cette ancienne ferme de 27 hectares est située dans un vallon du Beaujolais vert, sur la commune de Valsonne (entre Lyon et Roanne) et à une altitude moyenne de 700 m. Les terres se composent de bois, de friches remobilisables et de 12 ha de prairies. Les 5 amis s’organisent en société civile immobilière pour l’acquérir, avec un apport initial de 200 000 euros chacun. Certains comptent y habiter, d’autres en utiliser les ressources. Ils reçoivent les clés en décembre 2013.

La Ferme du Suchel est située dans un vallon du Beaujolais vert, sur la commune de Valsonne, sur la un site de 27 ha / Photo collectif La Ferme du Suchel

Le corps de ferme, en pierre, repose sur une emprise de 600m² au sol (comprenant la cour intérieure), dont 300m² de bâtiment (surface au sol), pouvant accueillir environ 600m² de planchers. Sur ces 600m², environ 450m² sont dédiés à de l’habitat, le reste des espaces sera consacré au volet agricole.

Une activité agricole en permaculture

Le groupe se composent d’une dizaine d’associés aujourd’hui avec différents niveaux d’implications : deux couples construisent leur habitat, une personne construit un habitat plus léger. Tous vont participer aux cultures vivrières. D’autres membres sont intéressés par l’agriculture et les activités collectives. Une dernière famille peut intégrer le projet pour l’habiter.

Le projet prévoit des espaces privatifs et des espaces communs / Photo collectif La Ferme du Suchel

Les associés visent l’auto-suffisance alimentaire et énergétique. Dans cette logique, le volet agricole a été pensé en permaculture dès 2014. « Nous étions un groupe de naturiste et d’écologues. La philosophie de la permaculture guide toutes nos actions. Pour nous, l’homme doit vivre en harmonie avec la nature, respecter ses principes fondamentaux. Nous serons donc en agro-écologie, sans mécanique. Nous cultiverons différentes variétés vivrières locales (maraîchères, céréales), peu gourmandes en eau. Le surplus sera vendu dans les marchés locaux. Et comme aucun de nous n’est végétarien ni vegan, nous aurons aussi des volailles et des lapins. Si un nouveau membre a d’autres idées d’activités, nous discuterons tous ensemble pour évaluer si ça correspond à notre philosophie et comment les mettre en place ». Côté énergie, le chauffage sera assuré par le solaire et le bois bûche, pour profiter des ressources naturelles.

Habitat partagé et mutualisation des ressources

Répondant aux principes de l’habitat partagé, le projet prévoit, outre des espaces privatifs, des espaces communs (buanderie, atelier, cuisine-salon, chambre d’ami.e.s, coworking…) et des salles de stockage et transformation agricole. « Nous recourrerons à la mutualisation du matériel, comme la machine à laver ou les outils de bricolage et jardinage. A terme, on pense même aux véhicules, afin de réduire leur nombre par adulte. Nous aurions différents modèles selon l’utilisation, et même un vélo-cargo pour emmener les enfants à l’école. » Les habitants feront par ailleurs aussi des économies substantielles grâce à de abonnements uniques pour l’eau et l’électricité.

Dans un logique participative, les membres du collectifs ont tenu à réaliser les travaux eux-mêmes. Ils ont ainsi mobilisé leurs familles et leurs réseaux pour les premières phases. Les deux premières années ont été dédiées au nettoyage du lieu, au débroussaillage des alentours et à l’évacuation de certaines parties qui étaient en train de s’effondrer (four à pain, sol en terre et gravats…). 5 ans plus tard, le gros œuvre de la partie centrale était finalisé, avec l’appui d’artisans locaux pour les choses les plus compliquées. « A partir de là, nous nous sommes faits accompagner sur la restauration de la partie historiquement habitable (aile nord), en faisant appel à un architecte et une assistance à maîtrise d’ouvrage. « 

Les associés ont réalisé la majorité des travaux eux-mêmes, épaulés par des artisans locaux / Photo collectif La Ferme du Suchel

Un chantier éco-responsable et participatif

Le chantier a respecté la logique éco-responsable :

  • utilisation de matériaux naturels (chaux , bois, laine de bois, paille, ouate de cellulose…)
  • utilisation de matériaux et de ressources locales
  • performance du bâtiment avec une résistance thermique meilleure que le BBC
  • respect du bâtiment, de son architecture
  • circulation maîtrisée de l’air et des flux hydriques
  • pénétration de la lumière

Aujourd’hui, des inconnus viennent aider tous les week-ends ou se renseigner. « Nous sommes obligés de refuser du monde tellement nous avons des demandes. Après, c’était notre objectif : nous voulions montrer que c’était possible et inspirer d’autres à faire pareil. Donc nous sommes satisfaits que notre projet intéresse autant. » Dès le début, les associés ont créé l’association Les Sources du Suchel, pour valoriser le site via des chantiers, des sorties découvertes ou d’autres actions de sensibilisation. C’est ainsi que l’ancien lavoir a pu être restauré ; un chemin autrefois abandonné réouvert ; une mare, 1 000 m2 de buttes en permaculture et une haie champêtre et fruitière créées.

Pour valoriser, l’association Les Sources du Suchel reçoivent le public lors de chantiers ou actions de sensibilisation / Photo collectif La Ferme du Suchel

Les premiers emménagements emménagements devraient intervenir à l’été 2021.

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